La programmation hivernale dédiée aux arts du récit s’est achevée en beauté, samedi 18 février, avec une carte blanche donnée au conteur autour des « Mille et Une Nuits ».
Passer une nuit entière à écouter des histoires, de 21 heures à 7 heures le lendemain matin, tel était le défi proposé par le Mandapa (Paris 13e) , du samedi 18 au dimanche 19 février, pour clore la 41e édition des Contes d’hiver, lancée le 5 janvier. Nous étions une petite trentaine à tenter de le relever samedi en début de soirée, pour finir à une dizaine d’irréductibles dimanche matin aux aurores. Avec, à la clé, comme souvent avec ces Nuits du conte, le sentiment d’avoir partager une expérience hors du commun, aux limites du spectacle et de la performance. Une performance indéniable pour Pascal Quéré qui a réussi l’exploit de raconter des récits extraits des Mille et Une Nuits pendant environ dix heures d’affilée, avec, bien sûr, plusieurs temps de pause, indispensables pour la voix du conteur et pour les oreilles de son auditoire.
Je connaissais jusque-là Pascal Quéré surtout pour sa remarquable série d’entretiens avec des conteurs et conteuses, regroupée sous l’intitulé « Etre conteur aujourd’hui » et disponible, depuis janvier 2015, sur YouTube. Mais je n’avais jamais vraiment eu l’occasion de l’entendre conter. Cette Nuit des Mille et Une Nuits a été l’occasion idéale de rattraper cette lacune. Et cela a été un réel délice de me plonger pendant près de dix heures dans l’écoute des multiples histoires extraites de ce célèbre recueil de contes. Et de franchir les différentes portes du palais du roi Shahriar, de son épouse Shéhérazade et de la sœur cadette de cette dernière, Dinarzade. Le tout bercé par la voix envoûtante de Pascal Quéré, idéale pour ce genre de soirée. Avec, en prime, la lecture de quelques extraits particulièrement bien choisis du magnifique roman de Jacqueline Kelen, Les Nuits de Schéhérazade (Albin Michel, 1986).
Un rêve éveillé
Il arrive toujours un moment au cours de ce type de veillées où l’on atteint la frontière entre fiction et réalité, où l’on plonge dans un sommeil plus ou moins profond dans lequel la voix du conteur semble encore nous parvenir de façon plus ou moins consciente. Je trouve que c’est précisément l’un des éléments qui rend intéressante l’expérience, cet état de rêve éveillé, cette sensation d’être dans une sorte d’entre-deux, à la lisière du pays des rêves. Le narrateur se transforme alors en une forme de passeur d’un monde à l’autre, du réel à l’imaginaire, du conscient à l’inconscient.
Et lorsqu’on quitte la salle du Mandapa au petit matin, pour reprendre le métro, on emporte dans son esprit le songe d’une nuit d’hiver passée en excellente compagnie, avec un artiste envoûtant, un auditoire de qualité, et surtout des histoires inoubliables qui ont traversé les siècles pour parvenir jusqu’à nos oreilles.
Programmation à venir : Printemps de la parole, du 3 au 19 mars. Le Mandapa. Une petite scène sur la Bièvre, 6, rue Wurtz, Paris 13e.