Blog « Les voies du conte » Critique

Anne-Gaël Gauducheau et Adrian Iordan content et chantent l’enfance avec humour

Dans le spectacle « Vieux contes féroces pour enfants d’aujourd’hui », la conteuse et l’accordéoniste font preuve d’une belle énergie pour évoquer les droits des plus jeunes.

La conteuse Anne-Gaël Gauducheau et l’accordéoniste Adrian Iordan dans le spectacle « Vieux contes féroces pour enfants d’aujourd’hui » | LOÏC HUBERT

A l’occasion de la soirée de clôture de la programmation « Contes et Rencont’es », saison 5, le duo MouveLOReille (Bérengère Charbonnier et Ariel Thiébaut) a accueilli, mercredi 8 juin, à la BAM ! (Bibliothèque associative de Malakoff) un autre tandem, celui formé par la conteuse et formatrice Anne-Gaël Gauducheau et le musicien accordéoniste Adrian Iordan, tous deux membres de la compagnie La Lune Rousse, implantée à Saint-Herblain (Loire-Atlantique), près de Nantes. Après la traditionnelle scène ouverte et le non moins traditionnel repas version « auberge espagnole », ces deux artistes ont proposé une représentation haute en couleurs de leur spectacle créé en 2017 dans le cadre de la Semaine des droits de l’enfant, Vieux contes féroces pour enfants d’aujourd’hui.

Anne-Gaël Gauducheau et Adrian Iordan mêlent habilement chansons populaires, comptines enfantines, berceuses, mélodies tziganes pour aborder un thème complexe : les droits des enfants, comme celui de manger à sa faim, d’aller à l’école, de ne pas être exploité, de grandir dans une famille aimante, etc. Autant de vœux pieux que l’on ne retrouve pas toujours dans la réalité des faits et encore moins dans les contes d’antan qui, contrairement à ce que l’on voudrait faire croire, ne sont pas du tout mièvres et tendres, totalement déconnectés de la dureté de la vie quotidienne (sauf dans leurs versions aseptisées et passées à la moulinette de Disney et consorts). Sur le ton décontracté d’une discussion à bâtons rompus entre une femme et un homme autour de l’enfance, le spectacle évoque parfois des sujets difficiles comme la mort d’un enfant ou les violences familiales. Toujours avec une bonne dose d’humour et de second degré, sans jamais se prendre trop au sérieux, tout en n’éludant pas les questions qui peuvent fâcher.

Parole métissée

La complicité entre la conteuse et son musicien est l’un des ressorts essentiels de ce spectacle, et repose sur un échange permanent entre les deux, parfois elle se tait pour laisser toute la place à la musique (les airs tziganes particulièrement entraînants et magnifiquement interprétés par l’accordéon virtuose d’Adrian Iordan) et parfois il devient conteur pour narrer ses histoires à sa façon. Tous les deux ont pas mal voyagé à travers le monde (Afrique de l’Ouest, Cuba, Salvador de Bahia, Océanie pour elle et Roumanie, Europe de l’Est et du Sud pour lui) et leur parole s’en ressent, métissée et riche des apports croisés de différentes cultures.

Une chose est sûre : le plaisir évident que prend ce duo à nous raconter leurs histoires est communicatif, on se laisse facilement entraîner par leur énergie et on se surprend à fredonner en leur compagnie des airs de notre enfance. On peut y voir une réponse parmi d’autres à la question qui sert toujours d’introduction aux enquêtes (dont une, datée du 7 mai, consacrée précisément à ces « contes féroces » du répertoire), entretiens et reportages proposés dans le cadre de l’émission hebdomadaire « C’est pas pour dire… » conçue par la compagnie La Lune rousse et diffusée le samedi de 11 heures à midi sur Jet FM (91.2) : « Au XXIe siècle, qu’est-ce qui pousse encore les gens à dire ou à écouter des contes, des poèmes, des épopées, des histoires de bonnes femmes ? (…) Toutes ces histoires, à quoi ça sert ? ». Et bien, ça peut servir à faire le bonheur de nos oreilles, tout simplement.

Vieux contes féroces pour enfants d’aujourd’hui, de et avec Anne-Gaël Gauducheau et Adrian Iordan. Dates des représentations à venir dans la rubrique Agenda du site de la compagnie La Lune Rousse.

Journaliste au Monde.fr depuis 1998, j’ai toujours éprouvé une admiration sans bornes pour ces artistes de la parole que sont les conteurs et conteuses. Après avoir travaillé pendant plusieurs années comme bénévole dans l’organisation de festivals de contes et de théâtre de rue, je me suis lancée en octobre 2013 dans l’aventure d’un blog consacré aux arts du récit, L’Arbre aux contes, qui a fermé définitivement en octobre 2021. Je participe désormais au blog collectif de « La Grande Oreille ».

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